TROUBLES DE L'HUMEUR |
1. GENERALITE :
a) ÉPIDÉMIOLOGIE
En France la prévalence sur la vie entière est, respectivement, de 10,7% pour les hommes et de 22,4 % chez les femmes
b) SUICIDE
Le risque suicidaire est inhérent à la dépression dont il constitue la principale complication. Il s'agit d'une complication difficilement prévisible, et qui n'est pas toujours liée à la gravité symptomatique.
- 12000 morts par suicide en 1992, chiffre qui a dépassé celui des accidents de la route.
- 70% au moins souffraient de dépression.
- Les hommes déprimés se suicident 2 à 3 fois plus que les femmes. La solitude est un des facteurs de risque le plus souvent retrouvé dans les études. Chez la personne âgée dépressive le risque suicidaire est 3 fois plus fort.
c) LES MYTHES DE LA MALADIE DÉPRESSIVE ( APA 1993) :
MYTHES | REPONSES |
1 - La maladie dépressive n'est pas sévère | le préjudice peut être intolérable |
2- Elle est rare | 25% des femmes sont à risque |
3- Elle répond rapidement au traitement | souvent, ça prend des mois |
4- Elle peut disparaître spontanément pour de bon | souvent, elle est handicapante |
5- Il ne s'agit pas de maladie sérieuse | 10% à 15% décèdent par suicide |
6- Il s'agit d'un épisode transitoire, sans lendemain | 75%, rechutent |
7- La psychothérapie peut éviter la survenue d'autres épisodes | elle la retarde seulement |
8- La chimiothérapie doit à tout prix être arrêtée | c'est l'inverse qui est vrai |
9- La chimiothérapie prophylactique peut être stoppée sans aucun risque | la récurrence aussi |
10- Il s'agit d'un trouble purement psychologique | elle implique des changements biochimiques et micro-structuraux du cerveau |
d) REALITE :
Maladie récurrente, potentiellement létale : 15% des dépressifs mort par suicide |
Implication de multiples fonctions cérébrales et somatiques |
Risques de récurrence 85% des sujets qui ont présenté un état dépressif majeur rechuteront au moins une fois. 50% des patients rechutent dans la 1ére année |
Risques d'abstinence thérapeutique => Douleur, dysfonctionnement, hospitalisations, re-réponse lente ou inadéquate, chronicité, suicide |
Le suivi est un garde-fou vis à vis de la ré-émergence des symptômes |
2. NOSOGRAPHIE :
La distinction qui séparait dépression endogène et dépression psychogène paraît inadéquate. Les études sur les événements de vie ont joué un rôle décisif dans l'abandon de cette différence : les événements de vie précédant l'apparition d'un épisode dépressif s'étant avérés qualitativement et quantitativement peu différents dans les deux cas...
Les lignes de démarcation que l'on a tendance à préférer aujourd'hui sont thérapeutiques et non plus étiologiques.
Actuellement une conception unitaire, de l'existence d'un trouble dépressif global, unique, de degrés de sévérité variables est privilégiée avec même l'idée d'une révolution beaucoup plus globale à travers l'idée de spectre
bipolaire.
Ce qu'on appelle désormais trouble bipolaire proprement dit (BP I) se caractérise essentiellement par un ou plusieurs épisodes maniaques habituellement accompagnés par un ou plusieurs épisodes dépressifs majeurs.
Il a été isolé et décrit au XIXe siècle par Falret (1851) avec la " folie circulaire " et Baillarger (1854) avec la " folie à double forme.
E. Kraepelin rassemblera tous ces " troubles affectifs " dans le cadre unique de la " folie maniaco-dépressive ", rapidement acceptée en France sous le terme de psychose maniaco-dépressive (PMD) qui s'opposait point par point à la démence précoce (la schizophrénie) par les caractéristiques suivantes : évolution périodique ou épisodique, meilleur pronostic avec parfois rémission généralement complète entre les accès et absence d'amoindrissement progressif, sinon à un stade très tardif de l'évolution.
Je rappelle que ces des théories ont été développées dans les années 1920...
On décrit plusieurs niveaux pathologiques, essentiellement en fonction de l'intensité des troubles (et une pénétrance génétique proportionnelle, de plus en plus faible), dans
le spectre des maladies de l'humeur:
Je ne compliquerais pas le tableau avec les états mixtes, les manies dysphoriques. Les tempéraments hyperthymiques et tous les tableaux intermédiaires. |
|
Importance capitale du diagnostic |
|
3. MODELE DE VULNERABILITE :
|
|
La théorie psychanalytique : La théorie psychanalytique de la dépression a été exposée par Freud dans " Deuil et mélancolie " en 1916, alors qu'Abraham travaillait aussi sur ce sujet. Pour Freud, la mélancolie est bien le deuil d'un objet perdu, même si ce dernier n'est pas consciemment repérable. Mais, à la différence de ce qui se passe dans le deuil normal, qui se résout par un déplacement de la libido vers de nouveaux objets, celle-ci se replie sur le Moi du mélancolique. Une partie du Moi, identifié à l'objet perdu, est dès lors en butte à la critique de l'autre partie du Moi. L'état maniaque est conçu par Freud comme une défense contre la perte d'objet, par la recherche désordonnée de nouveaux objets à investir. |
4. SYMPTOMATOLOGIE CLINIQUE :
1) EPISODE DEPRESSIF MAJEUR (EDM) :
Les Troubles de l'adaptation avec humeur dépressive ne répondent pas aux critères de l'épisode dépressif majeur
: deuil, adaptation à une situation de rupture...
Au moins cinq des symptômes suivants doivent avoir été présents pendant une période d'une durée de deux semaines. Les symptômes induisent une souffrance cliniquement significative ou une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans d'autres domaines importants.
Humeur dépressive (se sent triste ou vide) ; diminution marquée de l'intérêt ou du plaisir pour toutes ou presque toutes les activités ; perte de poids significatif ; insomnie ou hypersomnie presque tous les jours ; agitation ou ralentissement ; fatigue ou perte d'énergie ; sentiment de dévalorisation ou de culpabilité excessive ou inappropriée ; diminution de l'aptitude à penser ou à se concentrer ou indécision ; pensées de mort récurrentes.
2) TROUBLE DE L'HUMEUR PERSISTANT :
La dysthymie (ou névrose dépressive). Elle associe tout un ensemble de symptômes communs aux pathologies du caractère et aux troubles dépressifs, compatibles avec le maintien d'un certain niveau d'activité, à début insidieux et étendus sur une période prolongée (deux années au moins): humeur dysphorique, irritabilité, indécision, sentiment d'échec, baisse de l'estime de soi, ruminations négatives, découragement, fatigue, manque d'énergie, troubles du sommeil. La difficulté est de différencier cette symptomatologie dépressive peu prononcée d'un tempérament habituel.
La cyclothymie : Association régulière de phases d'hypomanie plus ou moins durables, particulièrement fécondes en projets et activités, à des phases sub-dépressives que le contraste avec le bien-être et la créativité des phases précédentes rend très éprouvantes malgré qu'elles n'atteignent pas l'incapacité dépressive.
3) MANIE :
Une période nettement délimitée durant laquelle l'humeur est élevée de façon anormale et persistante, pendant au moins une semaine. Au cours de cette période de perturbation de l'humeur, au moins 3 des symptômes suivants :
Augmentation de l'estime de soi (71%) ou irritabilité (80%) ; réduction du besoin de sommeil ; plus grande communicabilité que d'habitude ou désir de parler constamment ; fuite des idées ou sensations subjectives que les pensées défilent ; distractibilité ; augmentation de l'activité ou agitation psychomotrice ; engagement excessif dans des activités agréables mais à potentiel élevé de conséquences dommageables (achats inconsidérés, conduites sexuelles inconséquentes).
La perturbation de l'humeur est suffisamment sévère pour entraîner une altération marquée du fonctionnement social ou des relations interpersonnelles.
L'Hypomanie : forme atténuée de la manie : même symptomatologie atténuée. Absence d'altération marquée du fonctionnement social mais qui diffère de celui du sujet hors période symptomatique.
5. FORME CLINIQUE DE DEPRESSION :
1) Dépression anxieuse, dépression agitée :
L'agitation psychique et motrice majeure, le vécu de panique qui les caractérisent masquent la sémiologie plus proprement dépressive. Le risque de raptus suicidaire est extrême
2) La mélancolie :
Elle réalise une forme particulièrement prononcée d'état dépressif aigu, qui se distingue par :
L'importance du ralentissement psychomoteur ; une représentation de soi alimentée par un inépuisable sentiment de faute et d'indignité ; un sentiment d'incurabilité ; ruminations suicidaires incessantes ; une aggravation matinale des symptômes ; une anorexie grave, entraînant un amaigrissement important, souvent poussée jusqu'au refus alimentaire complet, avec mise en jeu du pronostic vital.
3) Les dépressions psychotiques (ou mélancolies délirantes) :
Les convictions dépressives négatives donnent naissance à de véritables constructions délirantes : Délires de culpabilité, de faute, de honte universelle, de punition, de damnation,, délire hypocondriaque d'incurabilité.
4) Dépression hostile, Dépression agressive :
L'humeur dépressive fait place à une dysphorie marquée, qui s'accompagne d'un trouble du contrôle des actions : réactions impulsives, colères mal maîtrisées, passages à l'acte auto et hétéro-agressifs. Le diagnostic peut en être difficile, le tableau orientant volontiers vers des troubles du caractère ; le caractère inhabituel d'un tel état, qui tranche avec la personnalité du sujet, permet de poser le diagnostic.
5) Dépressions masquées, Somatisation dépressives, Dépressions hypocondriaques :
Prépondérance des plaintes somatiques, au détriment des symptômes spécifiques que sont l'humeur et la psychologie dépressives : la sémiologie dépressive y est "masquée' par la présence de symptômes somatiques, que l'examen découvre dénués de fondement organique. Ces somatisations prennent souvent l'aspect d'une douleur atypique, rebelle aux antalgiques : dorsalgies, lombalgies, abdominales, plaintes gynécologiques, céphalées,
(efficacité de l'épreuve thérapeutique aux antidépresseurs, qui tranche avec l'échec des traitements antalgiques).
PRINCIPES DES INTERVENTIONS INFIRMIERES AUPRES DES PERSONNES SOUFFRANT DE TROUBLES AFFECTIFS:
La personne déprimée:
|
La personne maniaque:
|
Bibliographie :